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Rapport aumônerie en EMS 2020

Confinés, mais pas abandonnés !

Le difficile chemin de nos aînés en EMS et de leur entourage ​​​​​​​

L’année 2020 a été marquée par quelque chose d’absolument sans précédent : la crise du Covid-19. Cette crise a mis les humains face à leurs limites. Ils se sont rapidement trouvés démunis. Mais elle nous a aussi appris quelque chose : le désarroi et les limites vécues par chacun de nous, nous ont renvoyés collectivement et individuellement à notre fragilité, à notre pauvreté et à notre humanité. 

Sauver des vies

Face au Covid19, l’impératif de nos autorités a clairement été : sauver des vies, en particulier celles des plus faibles, celles des faibles parmi les faibles, celles de nos aînés. 

Fallait-il le faire ? On entend dire que cela n’a pas de sens de vouloir sauver la vie de personnes âgées qui ont vécu la leur, au détriment d’une jeunesse qui serait sacrifiée. Pour moi, il n’y a pas à choisir entre « les vieux » et « les jeunes !» Et je reconnais de la sagesse aux gouvernements qui n’ont pas hésité à subordonner les impératifs de la croissance économique à ceux de la santé publique. Cela correspond à un principe élémentaire de justice consigné dans l’article 3 de la Déclaration universelle des droits humains :  « Tout individu a droit à̀ la vie, à la liberté́ et à la sureté́ de sa personne ». C’est sans doute une première dans l’histoire mondiale. Jamais encore on n’avait, à pareille échelle, pris de tels risques économiques en faisant passer l’humain d’abord. 

Frustrations et déchirements

Sur le terrain, les mesures prises ont passé par les consignes de distanciation sociale obligeant à ne plus se serrer la main, à ne plus manger ensemble, à ne pas embrasser ses proches ni même à les rencontrer : un véritable déchirement pour nos résidents en EMS, confinés, interdits de visites et isolés dans leurs chambres.

En ce qui concerne l’aumônerie, nous avons rapidement été privés de tout types de rencontres: cultes, célébrations œcuméniques InterEMS, animations de toutes sortes ont été supprimés et les visites individuelles très limitées.

Un lourd tribut

Malgré toutes ces mesures,  les personnes âgées hébergées en EMS ont payé un lourd tribut à la maladie qui s’est répandue à une vitesse surprenante dans certains établissements.  L’impact du covid19 en EMS a été extrêmement variable d’un EMS à l’autre : certains établissements n’ont eu aucun malade alors que d’autres ont vu la moitié de leurs résidents atteints par la maladie avec une forte mortalité. Dans notre région, si la première vague a relativement épargné nos EMS, cela n’a pas du tout été le cas lors de la seconde vague. Durant cette dernière période, j’ai célébré un grand nombre de services funèbres de personnes emportées par le Covid-19 sans trop prendre garde à la question de savoir si je le faisais sur mon temps de ministre paroissial ou d’aumônier cantonal. 

Une réalité compliquée

Il faudrait se garder de faire une différence entre les EMS « qui auraient bien travaillé » et les autres… car ces lieux sont en complet décalage avec le reste de la population. La réalité est bien plus compliquée qu’une série de mesures à prendre, car au-delà des gestes barrières il y a une part de hasard et nombre de données que personne ne maîtrise. Par ailleurs certains EMS ont été tenus d’accueillir des malades COVID. Pour autant, l’objectif aura toujours été le même : avec les moyens à disposition, protéger au mieux chacun des résidentes et résidents. 

Mon travail durant la crise

Personnellement,  annoncé à mon employeur par l’OFSP comme personne à risque (suite à des interventions médicales vécues dans le passé), j’ai, dans un premier temps, été interdit de travail en présentiel.

Avec la levée progressive des mesures entre la première et deuxième vague, j’ai été encouragé à reprendre le travail in situ, par le Conseil synodal, mais à mes risques et périls avec présentation à mon employeur d’une attestation médicale. Sans couverture officielle de notre Église, j’ai renoncé, en accord avec les Conseils dont je dépends, à prendre des risques non seulement pour moi, mais aussi pour les Résidents des EMS dont je suis l’aumônier et pour ma famille. J’ai donc continué à assurer des visites par « Skype », par des courriers  et par des cultes, par la proposition de « cultes mosaïques en vidéo » et par des visites sur demande ainsi qu’au moment des fêtes de Noël.

Entre la première et la deuxième vague, j’ai effectué plusieurs passages en présentiel soit pour des visites soit pour des cultes, inaugurant au passage une nouvelle tenue ministérielle.

Le CADEMS recommandant aux aumôniers de limiter leurs passages/visites à un seul établissement, c’est l’EMS Beau-Site qui a en a le plus  profité tout au long de cette année difficile.

J’ai toutefois toujours répondu aux demandes d’accompagnement de fin de vie quel que soit l’établissement en me pliant aux différentes exigences - parfois fort variables et chronophage - des mesures de sécurité. 

A la fin décembre 2020, la reprise à l’heure du déconfinement s’annonçait difficile et compliquée et Noël bien triste.

Un retour à la normale ?  

Connaîtrons-nous un retour à la normale ?  Ce qui est sûr c’est qu’elle se fera en tenant compte des réalités de chaque EMS. Et certainement de la rapidité avec laquelle la population pourra être vaccinée. A l’heure où je rédige ce rapport, je me réjouis de savoir que vacciné – grâce à la généreuse proposition d’un directeur en EMS de me considérer comme membres de son personnel - je serai en mesure de reprendre sans appréhension le chemin de tous les établissements dont je suis l’aumônier.

Ce que nous a appris la crise

Pour terminer sur une note positive, j’aimerai dire que la crise nous a appris quelque chose : le désarroi et les limites vécues par chacun de nous, nous ont renvoyés collectivement et individuellement à notre fragilité et à notre pauvreté. Celles que Dieu en Jésus-Christ a lui-même revêtu, manifestant ainsi son amour pour l’humanité et sa solidarité avec les plus faibles. Fort de cet apprentissage de nos limites, aumôniers, bénévoles, membres du personnel ou de la direction des EMS, croyants ou non, nous nous sentirons sans doute plus proches que jamais de ceux-là mêmes que nous pensons aider d’habitude. 

Dialogue interreligieux

Au plan du dialogue interreligieux, l’année 2020 a aussi été difficile.

Si le groupe de dialogue Chrétiens/Musulmans s’est réuni trois fois, au lieu de 6-8 fois, le plaisir de se retrouver et de partager a toujours été le même. 

Pour ce qui est des manifestations prévues, en particulier lors de la Semaine des religions, tout a dû être annulé ou reporté.